Après quelques balbutiements et errements imputables à toute nouvelle technologie qui se met en place, l'encre électronique commence à arriver à une certaine maturité. Entachée à ses débuts d'une réputation peu flatteuse, qualifiée de gadget inutile, elle a peu à peu conquis ses lettres de noblesse pour se poser aujourd'hui en alternative viable au livre classique. Après divers acteurs gravitant historiquement autour du monde de l'édition, c'est au tour des grandes marques connues du public de se lancer dans l'aventure du livre électronique. Aujourd'hui, nous testons pour vous le dernier-né de Sony : le Reader PRS-650.

Ce lecteur d'ebook est basé sur la technologie eInk Pearl. Cette technologie de seconde génération, développée par la société E-Ink, garantit un contraste encore accru et une meilleure homogénéité des noirs. Pour rappel, l'encre électronique utilisée ici (de type électrophorétique) repose sur un système composé de millions de microcapsules contenant des particules d'encre et orientables par un système de champs électriques de faible intensité. Les avantages immédiats de l'encre électronique sont d'une part une très faible consommation, et d'autre part l'inutilité d'un dispositif de rétro-éclairage de la surface affichée. On arrive ici à un rendu très proche d'une feuille de papier classique.



Le lecteur de Sony mesure 16.5cm de haut, 11.8cm de large et 8mm d'épaisseur. Son écran de 6" (12.3cm x 9cm) offre une résolution native de 600 x 800 pixels et 16 nuances de gris. Il pèse un peu moins de 230 grammes, cartes mémoire incluses. L'objet donne immédiatement une impression de solidité et de sérieux, grâce au choix judicieux de matériaux de qualité, notamment un aluminium brossé du plus bel effet.

Le dessous de l'appareil présente un orifice pour la remise à zéro, la prise du chargeur / connecteur au format micro USB (un câble est fourni dans la boîte), une prise jack pour connecter un casque, et les boutons de réglage de volume. Car bien entendu, ce lecteur fait également office de lecteur MP3.



Le dessus du lecteur reprend le bouton de mise sous tension ainsi que les logements des deux cartes mémoire (l'une au format SDHC, l'autre au format Memory Stick), qui viennent compléter la mémoire interne de 2GB.



Comme l'écran est tactile, un stylet est également fourni. Celui-ci se range dans la tranche de l'appareil lorsqu'il n'est pas utilisé.



Comme nous l'avons souligné, l'écran est tactile. Le choix retenu pour celui-ci est assez surprenant. Point de résistif ou de capacitif, mais un matriçage infrarouge géré par un réseau de capteurs disposés sur le pourtour de l'écran. Encore une fois, le choix de la technologie est en phase avec la philosophie générale de l'appareil, qui vise entre autres un maximum d'autonomie. De plus, à l'usage, le système se révèle parfaitement réactif et très agréable à utiliser.

Enfin, sous l'écran, on retrouve divers boutons de commandes permettant de naviguer dans l'interface ou dans un livre, de revenir à la page d'accueil du lecteur, d'ajuster la taille de la police de caractères et d'afficher le menu contextuel des options.

L'affichage est net, clair, précis et bien contrasté. La lecture est aisée, pas du tout fatigante comme elle pourrait l'être sur un iPad ou une tablette dotée d'un écran LCD rétro-éclairé. On a vraiment l'impression de lire un livre, si l'on fait abstraction du fond très légèrement grisâtre.



Le passage d'une page à l'autre s'effectue en balayant l'écran comme on le ferait avec un livre normal ; on peut également utiliser les boutons de commande sous l'écran si l'on veut économiser la batterie. A titre d'information, celle-ci a une durée de vie étonnamment longue. En effet, il faut savoir qu'elle n'est sollicitée que lors d'un changement de page, au moment où le lecteur modifie son affichage. Hors cela, une page affichée ne consomme strictement aucune électricité et peut rester affichée indéfiniment. L'appareil inclut néanmoins une extinction automatique après deux minutes.

L'interface du PRS-650 est un modèle du genre : simple, structurée et compréhensible immédiatement, même par de jeunes enfants ou des personnes âgées. La page d'accueil reprend les derniers ouvrages copiés ainsi que le livre en cours de lecture. Il est possible de conserver un nombre important d’œuvres ouvertes simultanément, l'appareil gardant en mémoire la position de lecture dans chacune d'elles. Il est en outre très facile de créer à la volée des marques-pages en double-cliquant dans le coin supérieur droit d'une page. Les onglets ainsi constitués se retrouvant par après dans une liste centralisée, ce qui en facilite la manipulation et la gestion.



De même, il est très facile d'accéder à la liste des livres stockés sur l'appareil. Celui-ci embarque d'origine une mémoire de 2GB, ce qui suffit largement pour emporter avec soi près de mille bouquins. Au chapitre des formats reconnus, on trouve bien évidemment l'EPUB (avec ou sans DRM), le PDF, le TXT et le RTF. Pour gérer tout ce petit monde, vous avez le choix entre le logiciel fourni par Sony avec le lecteur, ou l'utilitaire "Digital Editions" d'Adobe. Ces deux logiciels nous ont paru lourds, peu pratiques et terriblement limités. Nous leur avons tout naturellement préféré Calibre, ténor du genre, à l'interface parfois un peu "encombrée", mais redoutablement plus efficace dès lors qu'il s'agit de cataloguer, trier et étiqueter tous nos ouvrages.

A noter que le logiciel du lecteur, outre l'aspect MP3 mentionné précédemment (et franchement anecdotique, il ne remplacera pas un bon lecteur MP3 mais vous dépannera à l'occasion si vous aimez écouter de la musique en lisant), embarque également une visionneuse d'image (compatible PNG, JPEG et BMP) et un gestionnaire de notes tirant parti du stylet. Le tout se voit complété par une douzaine de dictionnaire de traduction et deux dictionnaires de définitions (mais hélas, pas en français).

Le Sony PRS-650 nous a plu, immédiatement. Son utilisation est intuitive, et il est devenu le compagnon de chevet de notre cher Clandestino (qui s'est dévoué pour ce test en jouant les cobayes pendant près d'un mois, grâce lui soit rendue). Cependant, nous avons tout de même épinglé quelques points qui mériteraient selon nous d'être améliorés.

Tout d'abord, le packaging. Comme à son habitude, Sony ne fournit que le strict minimum : le lecteur, un câble de recharge, et c'est tout. Une pochette de protection eût été bienvenue, tout comme un chargeur. En effet, même si l'appareil affiche une autonomie de plusieurs semaines en utilisation normale (2-3h de lecture par jour), il est très désagréable de tomber à court de puissance en plein milieu d'un livre. Et si on n'a pas de laptop avec soi, on est cuit. Dommage.

Ensuite, le firmware a encore un peu trop souvent tendance à planter. Rien de catastrophique : au sortir d'une veille prolongée (où l'appareil se place s'il n'est pas utilisé plus de 3 jours), le lecteur a tendance à se geler au boot, et il faut jouer de l'attache-trombone dans l'orifice du reset pour le redémarrer. Heureusement, on ne perd aucun des livres stockés dessus, tout comme on conserve les marques-pages déjà sauvés.

Enfin, un logiciel de gestion digne de ce nom nous semble indispensable. Certes, nous autres geeks, sommes prompts à dégainer de l'open source et n'aurons aucun souci à nous procurer Calibre. Mais qu'en est-il de l'utilisateur lambda, qui devra se coltiner un programme peut-être réussi esthétiquement mais terriblement pauvre en fonctionnalités.

Mais le plus grand reproche que nous pourrions faire est sans aucune doute celui que nous adressons non plus à Sony, mais aux éditeurs. Hormis quelques pionniers comme ePagine ou Le Belial, peu encore on su faire le pas vers le numérique et offrir un catalogue digne de ce nom. On peut espérer que la situation va évoluer dans les mois qui viennent, mais on rappellera que toute technologie, aussi alléchante et intéressante soit-elle, ne vivra et ne perdurera que par le contenu qui permettra de l'exploiter. Messieurs les éditeurs, la balle est dans votre camp !