Titre: Les banques européennes aveugles face à l’impact des FinTechs (30/01/2019 Par zion)
Au sein du secteur bancaire européen, le simple passage au numérique ne suffit plus. Les décideurs des banques en traditionnelles doivent en effet être mesure de déceler les principales menaces qui pèsent sur leur secteur (évolution réglementaire, paysage politique, concurrence nouvelle et technologies émergentes). Ils doivent par ailleurs comprendre dans quelle mesure ces menaces sont susceptibles de réduire, déplacer, court-circuiter ou même détruire leur activité au cours des cinq prochaines années.

Les réformes liées à la Directive révisée concernant les services de paiement (PSD2) et à l’open banking préparent actuellement le terrain à l’arrivée de « nouveaux » entrants. De fait, un récent rapport sur le nouveau génome bancaire révèle que plus de la moitié (55 %) des nouvelles banques digital first et 61 % des FinTech sont davantage confiance dans leur capacité à concourir face aux établissements bancaires existants. Toutefois, il est inquiétant de constater que les banques en place semblent ne pas avoir conscience de cette situation ; seul un tiers d’entre elles (36 %) perçoivent les menaces de ce nouveau paysage.

Ce rapport présente les résultats de recherches menées auprès de plus de 300 cadres du secteur bancaire européen. Il souligne que les nouvelles réformes bancaires ne constituent pas un pensum supplémentaire lié à un bouleversement réglementaire, mais plutôt le début d’une nouvelle dynamique au sein du secteur.

Les licornes du numérique font vaciller les banques
Outre les inquiétudes liées aux nouvelles banques et aux FinTechs, l’étude constate que les banques en place considèrent les géants de la technologie comme Amazon, Google et Facebook comme une menace majeure. Plus d’un quart d’entre elles (28 %) estiment en effet que ces mastodontes du numérique constitueront les principaux concurrents des établissements bancaires au cours des trois prochaines années.

Si la majorité des banques en place considèrent qu’elles sont en mesure de conserver un avantage compétitif sur les FinTechs et les nouvelles banques dans leurs domaines de prestations actuels, 45 % d’entre elles craignent de perdre un atout stratégique dans le secteur des prêts aux particuliers non sécurisés avec l’essor des prêts peer-to-peer. Une autre menace importante concerne la capacité des FinTechs qui s'appuient sur la blockchain à perturber les banques traditionnelles à différents niveaux de la chaîne de valeur bancaire. Les FinTechs remportent actuellement la bataille, 34 % d’entre elles recourant déjà à la blockchain, contre 17 % seulement des banques en place. D’après le rapport, tout acteur du secteur qui considérerait que la blockchain n’est pas en mesure de court-circuiter les banques dans les cinq à dix prochaines années ferait preuve d’un manque total de clairvoyance.

Pourtant, la majorité des cadres du secteur bancaire interrogés (77 %) conviennent que l’accès aux données consommateurs dont disposent les banques en place reste pour elles un atout par rapport aux FinTechs et aux nouvelles banques.

Les nouvelles règles bancaires se concrétisent
Face aux menaces des banques « challengers », des FinTechs et des géants de la technologie, une catégorie de banques traditionnelles apparaît progressivement : les « banques résilientes ». Ces établissements ont engagé l’automatisation avancée du traitement des données au niveau du front office, intégré l’analyse des données en temps réel pour soutenir les principaux services du middle et du back office, et adopté des solutions de cloud public. Ils s'attachent bien plus que les autres à améliorer la culture interne et l’expérience client numérique, et travaillent en partenariat plus étroit avec des tiers opérant à la fois à l’intérieur et à l’extérieur du secteur bancaire.

Le rapport définit le Nouveau Génome Bancaire et met l’accent sur cinq étapes que les banques en place doivent suivre pour devenir des « banques résilientes » :

Placer les clients au cœur des modèles opérationnels : recadrer les données et les processus autour des clients. Débuter en simplifiant les systèmes hérités et en engageant l’automatisation. Puis diriger prioritairement les investissements vers l’expérience numérique et le data analytics.
Adopter le modèle du marché : l’open banking n’en est encore qu’à ses balbutiements, mais il a le pouvoir de développer l’innovation. Étudier les possibilités des prestations de FinTechs en marque blanche, en nouant voire en créant un partenariat avec des incubateurs/accélérateurs de FinTechs.
Profiter du bouleversement réglementaire à venir comme d’un catalyseur du changement : la PSD2 est susceptible de mettre en évidence les défaillances des banques en place en matière de technologie, de culture et de services clients. Mais les changements réglementaires devraient être envisagés comme un catalyseur encourageant des actions en termes d’optimisation, d’innovation et de transformation.
La culture de l’innovation doit venir d’en haut : cette culture doit également constituer l’axe autour duquel tourne l’objectif stratégique prioritaire. Assurer une communication régulière à ce sujet en encourageant les collaborateurs à donner leur avis sur les actions stratégiques.
Ne pas oublier la blockchain : les répercussions de la blockchain seront profondes à tous les stades ou presque de la chaîne de valeur bancaire. Identifier ces risques potentiels, procéder à des tests puis se renforcer pour rester résilients.

Alors que les organismes réglementaires nivellent le secteur et que la technologie contribue à faire tomber les barrières à l’entrée de cette industrie, en en modifiant la dynamique, les banques européennes sont tenues de faire preuve d’une résilience de plus en plus grande. Elles doivent redéfinir leur modèles opérationnels et économiques afin de faire face à un nouvel environnement concurrentiel, accélérer rapidement leurs cycles d'adoption des nouvelles technologies et accroître de façon massive leur capacité de réponse aux changement géopolitiques. Cette nouvelle approche des “banques résilientes” devrait constituer un antidote contre les FinTechs, et aider ainsi les banques traditionnelles à adapter et redéfinir leurs modèles pour rester compétitives, quels que soient les nouveaux entrants auxquels elles seront confrontées.
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